L’expert-comptable est en quelque sorte la sentinelle du temple de ses clients, le gardien discret de leurs données les plus précieuses. Il veille imperturbablement à la confidentialité des informations et protège leurs intérêts. Pour autant, quelles sont les conventions des experts-comptables en matière de secret professionnel ? Découvrons ensemble ce qui les oblige à rester muets comme des carpes.

Est-ce qu’un expert-comptable est tenu au secret professionnel ?

La réponse est oui ! Tous les experts-comptables, qu’ils soient en exercice, stagiaires ou salariés d’un cabinet, ainsi que les professionnels autorisés à exercer partiellement cette activité, sont soumis au secret professionnel, comme inscrit dans l’article 21 de l’ordonnance n°45-2138 du 19 septembre 1945 réglementant le titre et la profession.

Quelles informations sont concernées par l’obligation de secret professionnel de l’expert-comptable ? 🤐

En réalité, toutes les informations obtenues par l’expert-comptable dans le cadre de sa mission sont couvertes par le secret professionnel. Cela va des confidences reçues directement du client, aux informations financières, en passant par les documents comptables ainsi que les données fiscales. Il est même question de secret professionnel absolu, car l’expert-comptable y est tenu, quoi qu’il advienne. Ainsi, même si son client l’y autorise, il ne peut y déroger. 🙊

La manipulation de ces données sensibles implique de garder le silence sur la plupart des échanges. Toutefois, il demeure des informations publiques qui ne profitent pas de la couverture du secret, comme les comptes annuels.

Secret professionnel VS devoir de discrétion 🤫

En parallèle du secret professionnel, l’expert-comptable a un devoir de discrétion. Celui-ci concerne les informations plus générales recueillies lors d’une mission mais qui ne sont pas strictement confidentielles.

Le devoir de discrétion relève du code de déontologie des experts-comptables, notamment de l’article 147 qui rappelle que « Sans préjudice de l'obligation au secret professionnel, les personnes mentionnées à l'article 141 sont soumises à un devoir de discrétion dans l'utilisation de toutes les informations dont elles ont connaissance dans le cadre de leur activité ».

Contrairement au secret professionnel, la règle de discrétion peut être levée s’il y a un accord écrit du client. Évidemment, un expert-comptable ne peut partager des informations comptables à des tiers sans en avoir obtenu l’autorisation préalable. S’il utilise le nom d’un de ces clients sur un support de communication sans son consentement, par exemple, il s’expose à recevoir des sanctions disciplinaires. 🧨

Les sanctions en cas de violation du secret professionnel

La violation du secret professionnel peut entraîner 3 types de sanctions :

Les sanctions pénales 🔗

L’article 226-13 du Code pénal prévoit une peine d’un an d’emprisonnement et une amende pouvant aller jusqu’à 15 000€ en cas de révélation d’informations strictement confidentielles.

Les sanctions civiles 💰

Si la violation du secret cause un préjudice au client, l’expert-comptable peut être condamné à verser des dommages et intérêts pour réparer le tort qu’il a causé.

Les sanctions disciplinaires 👋

L’Ordre des experts-comptables peut prononcer des sanctions, qui peuvent aller de la simple réprimande, à la suspension temporaire d’exercice, en passant par une radiation définitive du tableau de l'Ordre en cas de non-respect des règles professionnelles et déontologiques.

👀 Par ailleurs, si un salarié d’un cabinet d’expertise comptable se met à dévoiler des données confidentielles, l’employeur peut prendre des mesures disciplinaires en fonction de la gravité de la situation : avertissement, mise à pied ou licenciement pour faute grave, notamment lorsque cela porte préjudice au cabinet ou aux clients.

Les dérogations au secret professionnel

Certaines situations autorisent à lever la règle du secret professionnel, et permettent ou obligent l’expert-comptable à divulguer des informations, notamment au procureur de la République ou à des organismes comme l’Autorité des marchés financiers, par exemple.

1. Réquisitions judiciaires

L’article 77-1-1 du Code de procédure pénale permet aux autorités judiciaires d'obtenir des informations confidentielles dans le cadre d’une enquête. En outre, lors de celle-ci, un juge ou un officier de police judiciaire peut être amené à saisir des documents comptables.

2. Déclarations de soupçon

Selon l’article L561-2 du Code monétaire et financier, l'expert-comptable doit signaler à Tracfin toute opération suspecte liée au blanchiment d'argent. Il est également tenu de transmettre certaines informations à l'administration fiscale ou sociale. 

Enfin, dans le cadre de la lutte contre la fraude, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, il est autorisé à divulguer toute donnée pouvant contribuer à y mettre un terme. 

3. Procédures collectives

Lorsqu’une entreprise est en procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, l’expert-comptable peut lever le voile sur des informations en sa possession.

4. Défense de l’expert-comptable

L’expert-comptable peut se défendre en justice en révélant certaines informations lorsqu’il y a un litige avec un client. En cas de contentieux civil, le secret professionnel peut donc être ignoré, mais seulement si cela est véritablement indispensable pour assurer sa propre défense.

Ainsi, en janvier 2023, le Conseil d’État a rappelé que la levée du secret professionnel pouvait être autorisée uniquement si elle était nécessaire à la défense de l’expert-comptable. Cette clarification a conduit à la décision de jurisprudence n°440070.

5. Autorisation expresse du client

Un client peut lever le secret professionnel et autoriser l’expert-comptable à communiquer certaines informations à des tiers. Avec son accord, par exemple, il peut tout à fait transmettre des documents à son successeur. Mais en dehors de cas bien particuliers et sans accord écrit, toute divulgation d'informations protégées constitue une infraction et peut entraîner, comme nous l’avons vu, des sanctions pénales et disciplinaires.

👀 Il est tout à fait possible d’anticiper le besoin de transmissions d’informations. Ainsi, dès la lettre de mission, il est important de préciser les données qui seront communiquées à certains organismes, tels que l’administration fiscale, les organismes sociaux ou encore la Banque de France, pour qu'il n'y ait pas de surprises. D’ailleurs, tout ce qu’il faut savoir sur la lettre de mission, c’est ici !

Dans certaines situations, la divulgation d’informations habituellement confidentielles peut être tout à fait légitime. En effet, leur communication peut parfois s’avérer nécessaire et justifiée, comme c’est le cas entre associés ou collaborateurs d’un cabinet. D’ailleurs, lorsque partager certaines informations fait naturellement partie de la mission du professionnel, cela constitue une exception parfaitement admise à l’obligation de secret. Après tout, le secret professionnel n’a jamais eu pour but de freiner ou d’entraver l’accomplissement des missions, bien au contraire ! 😉

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