Lorsque vous accompagnez vos clients dans leur gestion comptable et fiscale, vous vous engagez à mettre en œuvre toutes vos compétences pour atteindre les objectifs fixés au contrat. Juridiquement, vous êtes alors tenu à une obligation de moyens ou de résultat. La distinction est cruciale, car elle détermine l’étendue de votre responsabilité si les objectifs ne sont pas atteints. Alors, qu’impliquent ces différentes notions ? Quelles nuances apportent l’obligation de moyens renforcée ? On fait le point. 🦸

Quelles différences entre obligation de moyens et obligation de résultat ?

Issue des anciens articles 1137 et 1147 du Code civil, cette distinction est fondamentale en droit des contrats et a des implications importantes en termes de responsabilité et de charge de la preuve. ⚖️

La nature de l’engagement

Dans le cas d’une obligation de résultat, le professionnel ne doit pas simplement faire de son mieux. Il s’engage à atteindre un résultat précis, déterminé dès la conclusion du contrat. Ici, la qualité des compétences et des moyens mis en œuvre par le prestataire n’a aucune importance. Seul le résultat compte. 

À l’inverse, le professionnel tenu par une obligation de moyens doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour réaliser l'objectif visé, mais ne garantit pas sa réussite. Il y a donc un aléa sur le résultat. 

La charge de la preuve

C’est-là la différence la plus significative en cas de litige : 

  • En présence d’une obligation de résultat, le simple fait de ne pas réussir l’objectif visé dans le contrat suffit à constituer la faute et à engager la responsabilité du professionnel. Pour obtenir réparation de son préjudice, le client doit simplement démontrer que le résultat promis n’est pas atteint.
  • En matière d’obligation de moyens, en revanche, le créancier (ici le client) doit prouver la faute du débiteur (ici le professionnel). C’est-à-dire le fait qu’il n’ait pas mis en œuvre toutes les compétences et la rigueur nécessaires à l’accomplissement de sa mission.   

L’exonération de responsabilité

Quel que soit le type d’obligations présentes dans le contrat, il existe toujours des causes limitatives ou exonératoires de responsabilité prévues par la loi. Pour se libérer de son devoir d’indemnisation, le débiteur peut ainsi démontrer que l’échec de sa mission résulte d’une cause étrangère au contrat (un cas de force majeure, par exemple). 

En présence d’une obligation de résultat, c’est même la seule option du débiteur pour pouvoir se libérer de sa responsabilité. Qu’il ait ou non agi avec compétences et diligence dans ses missions n’a aucune incidence. 

Tenu par une obligation de moyens, en revanche, le prestataire est exonéré de toute responsabilité s’il a agi sans faute et a fait tout son possible pour atteindre les objectifs.

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Qu’est-ce que l’obligation de moyens renforcée ?

L'obligation de moyens renforcée, aussi appelée « obligation de résultat atténuée », est une forme d’obligation contractuelle créée par la jurisprudence. À mi-chemin entre l'obligation de moyens et l'obligation de résultat, elle impose à un professionnel de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour atteindre un objectif, mais sans garantie du résultat. S’il n’arrive pas à obtenir le résultat escompté, sa responsabilité peut être engagée, sauf s’il démontre qu’il n’a commis aucune faute.

🔎 Concrètement, dans le cadre d’une prestation de service, le professionnel s’engage à faire « de son mieux » pour parvenir au résultat visé. En cas d’échec, il est présumé responsable. Charge à lui de prouver qu’il a réalisé ses missions avec toutes les compétences et le professionnalisme requis.

💡 Et c’est là toute la différence avec la simple obligation de moyens classique. Dans ce type d’obligation, c’est au créancier (le client) de prouver que le prestataire a commis une faute ou n'a pas déployé tous les moyens nécessaires à sa mission. 

Ainsi, concernant l’obligation de moyens renforcée, il y a un renversement de la charge de la preuve. Le client doit uniquement prouver que l’objectif visé dans le contrat n’est pas atteint. Pour s’exonérer de sa responsabilité, ce sera alors au prestataire de démontrer qu’il n’a commis aucun manquement dans l’exécution de son obligation. 

Expert-comptable : obligation de moyens ou de résultat ?

Professionnel du chiffre, la collaboration que vous engagez avec un client est encadrée par la lettre de mission qui fixe les devoirs et obligations de chacune des parties. 📜 Ce document contractuel est essentiel, car c’est lui qui définit précisément le périmètre des missions qui vous sont confiées et les responsabilités qui en découlent.

➡️ En général, un expert-comptable est soumis à une obligation de moyens et non de résultat. Cela signifie que vous vous engagez à mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour accomplir votre mission, sans pour autant garantir la réussite d’un objectif précis. Votre responsabilité peut donc être engagée en cas de faute, mais la charge de la preuve incombe à votre client. S’il souhaite obtenir réparation d'un préjudice, il devra prouver les manquements commis dans l'exécution de vos obligations et le lien de causalité avec les dommages subis. 

➡️ Au-delà des termes stricts du contrat, le Code de déontologie de la profession impose un devoir général de conseil et d’information à l’égard de vos clients. Et la jurisprudence a depuis longtemps précisé l’étendue de cette exigence : le devoir de conseil et d’information qui pèse sur l’expert-comptable est une obligation de moyens renforcée. C’est-à-dire que la charge de la preuve du conseil vous incombe. En cas de litige avec l’un de vos clients, c’est à vous de démontrer que vous l'avez bien informé de la législation en vigueur et des risques potentiels (qu’ils soient d’ordre fiscal, juridique ou financier) associés à sa situation ou sa prise de décisions. En cas de mauvais conseils ou si vous ne parvenez pas à prouver que le conseil a été donné, votre responsabilité sera retenue si ce manquement a généré un préjudice pour votre client.

➡️ Par ailleurs, dans certains domaines précis, la jurisprudence a établi que l'expert-comptable pouvait être soumis à une obligation de résultat. C'est notamment le cas en matière de déclarations fiscales, où la Cour de cassation a décidé que l'expert-comptable était tenu à une obligation de résultat concernant le dépôt des liasses fiscales dans les délais.

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Quelles sont les responsabilités de l’expert-comptable ?

En tant que professionnel de l’expertise comptable, votre responsabilité peut être mise en cause sur 3 plans principaux : civil, pénal et disciplinaire.

La responsabilité civile

La relation commerciale conclue avec votre client est encadrée par la lettre de mission qui fait office de contrat. Ainsi, en cas de faute ou de négligence dans l’exécution de vos missions, vous engagez votre responsabilité contractuelle. Votre client pourra demander des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. 

💡 Si le dommage est causé à un tiers, c’est la responsabilité civile délictuelle qui pourra être recherchée.

La responsabilité pénale

Que vous en soyez l’auteur principal ou simplement complice, votre responsabilité pénale peut être mise en cause si vous commettez des infractions (exercice illégal de la profession, fraude fiscale, violation du secret professionnel…).

La responsabilité disciplinaire

L’expertise comptable est une profession réglementée et impose le respect de règles strictes, notamment celles établies dans le Code de déontologie (devoir de discrétion, obligation de maintenir et d’actualiser ses compétences…). Toute faute professionnelle peut ainsi engager votre responsabilité disciplinaire et entraîner des sanctions prononcées par l'Ordre des Experts-Comptables (du simple avertissement à la radiation définitive pour les manquements les plus graves).

😶🌫️ En définitive, la distinction entre obligation de moyens et de résultat n'est pas toujours évidente dans la pratique. Et l'émergence de l'obligation de moyen renforcée ajoute encore une nuance supplémentaire. Pour sécuriser un maximum vos contrats de prestation, définissez clairement au départ le cadre de vos interventions dans la lettre de mission. Puis tout au long de la collaboration, documentez soigneusement vos actions et les conseils délivrés à vos clients, et gardez toujours un œil sur l’évolution des jurisprudences et réglementations.

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