Le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme sont au cœur des préoccupations des autorités financières mondiales. Alors que le blanchiment transforme des fonds illicites en argent « propre », le financement du terrorisme mobilise des ressources pour soutenir les activités terroristes. Malgré leurs objectifs distincts, ces deux phénomènes criminels exploitent les mêmes failles des systèmes financiers pour masquer l'origine et la destination des fonds et éviter de se faire repérer. Techniques utilisées, rôle des cryptomonnaies, réglementations… On fait le point sur le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, et les enjeux de cette criminalité financière de plus en plus sophistiquée. 🦸

Comprendre le blanchiment d’argent

Le blanchiment d'argent, c’est le processus qui consiste à donner une apparence légitime à des fonds qui proviennent, en réalité, d’activités illicites (proxénétisme, drogue, trafic d’armes…). On parle de « blanchiment » de manière imagée : les criminels cherchent à transformer de l’argent « sale » (issu du crime) en argent « propre », réutilisable dans le circuit financier légal sans risque de détection par les autorités. 🥷 Variées et de plus en plus sophistiquées, les méthodes de blanchiment impliquent généralement 3 étapes : 

  • Le placement : l’argent sale est injecté dans le système financier.
  • La superposition : les fonds sont déplacés, transformés, et/ou mélangés à d’autres (d’origine licite, notamment) pour brouiller les pistes et noyer ces sommes dans des transactions tout à fait légales.
  • L’intégration : l’argent blanchi est réintroduit dans l'économie sous une forme légitime et peut être librement utilisé par les criminels.

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Comprendre le financement du terrorisme

Le financement du terrorisme est le fait de fournir, collecter ou gérer, de manière intentionnelle, des fonds destinés à être utilisés dans le cadre d’activités terroristes. 🔎 Ce soutien financier peut prendre de très nombreuses formes et provenir de sources légales ou illégales. La plupart du temps, les revenus générés sont d’origine criminelle (trafic de stupéfiants, enlèvement contre rançon, traite d’êtres humains…). Mais ils peuvent aussi provenir d’activités tout à fait légales, par exemple :

  • Organisations caritatives à but non lucratif : certaines associations peuvent être infiltrées ou contrôlées par des groupes terroristes. Sous couvert de soutenir des causes humanitaires ou sociales, des fonds sont collectés, mais en réalité une partie ou la totalité de cet argent est détourné pour financer des activités terroristes.
  • Dons et financement participatif : les groupes terroristes utilisent souvent les réseaux sociaux et les plateformes de financement participatif pour lancer des campagnes de collecte de fonds. Ces campagnes sont parfois déguisées en appels à des causes humanitaires, attirant donc aussi des contributions de personnes bien intentionnées qui ne se doutent pas forcément de la véritable destination de leur argent. À l’inverse, les dons privés sont généralement collectés de manière discrète, sans appels publics ni remise d’accusé de réception pour les fonds versés au groupe, rendant d’autant plus difficile leur détection par les autorités. 
  • Investissement : l’argent provenant d'activités légales (ou blanchi) peut être investi dans différents placements (actions, obligations, biens immobiliers…) et générer des rendements qui serviront au financement du terrorisme.
  • Entreprises légitimes : les groupes terroristes peuvent créer ou exploiter des entreprises (restauration, construction, immobilier…) pour produire des revenus licites, ensuite réinjectés dans leurs opérations criminelles.

📌 Qu’ils proviennent d’activités légales, ou non, les fonds récoltés sont ensuite déplacés généralement par des systèmes informels, à travers un réseau d’individus, en dehors de tout cadre réglementaire (comme la hawala, très utilisée en Afrique et au Moyen-Orient). Ce mécanisme permet d’envoyer de l’argent très rapidement partout dans le monde à moindre coût, et surtout, sans trop de risque de traçabilité (les transactions n’étant jamais enregistrées).

Pourquoi on associe la lutte contre le blanchiment et celle contre le financement du terrorisme ?

Le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme sont étroitement liés, car ils utilisent des mécanismes financiers similaires. Dans les deux cas, les criminels cherchent à dissimuler leurs activités et à masquer l'origine et la destination des fonds pour éviter d’attirer l’attention des autorités. Les terroristes utilisent ainsi des systèmes financiers complexes et des méthodes de blanchiment (sociétés-écrans, transactions en espèces, cryptomonnaies…) pour brouiller les pistes, préserver leur anonymat et limiter les risques de détection. 😶‍🌫️ Cela leur permet de transférer des fonds sans difficulté au-delà des frontières et financer l’ensemble de leur organisation : 

  • Attaques terroristes; 
  • Propagande et recrutement de nouveaux membres ;
  • Achat des armes et du matériel destinés aux opérations ;
  • Formations et camps d’entraînement ;
  • Rémunération des membres et de leur famille ;
  • Etc.

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Le rôle prépondérant des cryptomonnaies

Très prisées des organisations criminelles, les cryptomonnaies sont de plus en plus utilisées dans le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Et pour cause, les caractéristiques de ce type d’actifs financiers offrent un anonymat et une liberté d’action quasi totale pour ses utilisateurs : 

  • Anonymat : les transactions en monnaie virtuelle peuvent être réalisées de manière quasi anonyme. L’identité des personnes derrière les adresses de portefeuilles virtuels n’est jamais révélée, rendant très difficile la traçabilité des fonds. 
  • Mobilité transfrontalière : les cryptomonnaies permettent de transférer de l’argent rapidement partout dans le monde à moindre coût, sans être soumis aux restrictions des systèmes bancaires traditionnels. Les criminels peuvent ainsi déplacer des fonds plus facilement et les dissimuler dans des pays où les régulations sont moins strictes.
  • Décentralisation : contrairement aux monnaies classiques, les transactions en cryptomonnaies s’effectuent entre pairs, sans intervention d’une autorité centrale de contrôle (comme une banque). La surveillance et l'interception de mouvements financiers illégaux sont donc bien plus complexes pour les autorités.
  • Dark web : le dark web est une partie cachée d’internet accessible uniquement via des navigateurs spécifiques (comme Tor) qui masquent l'adresse IP des utilisateurs et offrent ainsi une solide confidentialité. Sur cet espace, des marchés illicites permettent d'acheter et vendre des biens et services illégaux, le plus souvent via l’utilisation de cryptomonnaies comme moyen de paiement. Cette combinaison d'anonymat et de décentralisation offre aux criminels une plateforme idéale pour blanchir de l'argent et financer des activités terroristes.

Comment combattre blanchiment d’argent et financement du terrorisme ?

⚖️ La diversité des réglementations d’un pays à l’autre est la principale difficulté dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT). Les pays aux législations et mesures de contrôles les plus faibles sont forcément très attractifs pour les criminels, qui peuvent y exercer leurs activités sans craindre aucune poursuite. Pour être efficace, la lutte contre la criminalité financière exige donc une coopération mondiale. Les pays doivent travailler ensemble pour partager les informations, mettre en œuvre différentes mesures de sensibilisation et de contrôles et surtout, harmoniser leurs lois afin de combler les failles exploitées par les criminels. 

Renforcement et harmonisation de la réglementation

La nature transnationale du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme exige une collaboration de tous les pays et la mise en œuvre de réglementations strictes. Au niveau mondial, le Groupe d'action financière (GAFI) est l’organisme de surveillance contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Il établit les lignes directrices que les pays doivent mettre en œuvre et s’assure de la conformité à ces normes anti-blanchiment et financement du terrorisme. 

En France, les directives européennes reprennent les recommandations du GAFI en matière de LCB-FT et sont transposées dans le Code monétaire et financier. Les professionnels particulièrement exposés au risque de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme (institutions financières, professionnels du chiffre et de la justice…) sont ainsi soumis à des obligations de vigilances. Cela se traduit par la mise en place de procédures de connaissances clients, de surveillance constante au fil du partenariat, et d’une obligation de signalement à Tracfin (la cellule française du Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins) à la moindre opération suspecte. 

Intelligence artificielle (IA)

Les techniques de blanchiment et de dissimulation des flux financiers sont de plus en plus sophistiquées et nécessitent une adaptation constante des organismes de contrôle. L’utilisation de l’intelligence artificielle peut améliorer la détection des transactions suspectes et des schémas de blanchiment d'argent. Des volumes massifs de données transactionnelles sont analysés en temps réel et les algorithmes d'apprentissage automatique de l’IA peuvent repérer des anomalies et prédire des comportements frauduleux en se basant sur des données historiques.

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Encadrement des cryptomonnaies

Par leur nature innovante et difficile à contrôler, les cryptomonnaies ont longtemps échappé à toute réglementation efficace, laissant le champ libre aux transactions criminelles quasi intraçables. Si certains pays ont développé leurs propres législations, un renforcement et une harmonisation des réglementations restent indispensables pour encadrer l’utilisation des cryptomonnaies, qui sont par nature des actifs financiers transfrontaliers. 

📜 En France, les différentes directives européennes anti-blanchiment ont été transposées dans la loi et imposent notamment un enregistrement obligatoire des PSAN auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF) et s’agissant de l’agrément, jusque-là facultatif, il est en passe de devenir obligatoire depuis l’adoption d’un nouveau règlement européen. 

En effet, pour offrir un cadre plus strict et surtout harmonisé entre les États membres, l’Union européenne a adopté le règlement « MiCa » (markets in crypto-assets) applicable pour l’essentiel d’ici fin 2024. Cette nouvelle réglementation prévoit notamment des exigences strictes en matière de LCB-FT et l’obligation d’obtenir un agrément européen unique pour tous les prestataires fournissant des services sur crypto-actifs. Depuis le 1er juillet dernier, il est déjà possible de déposer un dossier de demande d’agrément auprès de l’AMF, l’idée étant d'anticiper au mieux l’application des nouvelles réglementations en la matière. Le règlement « MiCa » instaurera ainsi un cadre renforcé et harmonisé au sein de l’Union européenne, plus efficace pour lutter contre la criminalité financière, en particulier le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

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